La communication, une question de perception
En communication, nous avons l’illusion que les mots ont le
même sens ou plutôt la même résonance pour tous, que celui qui écoute comprend
la même chose que ce que nous disons. Ce n’est pas tout-à-fait cela.
Quand un locuteur prononce le mot mort,
il a tendance à penser que l’auditeur entend le même mot (ou plutôt, voit la même réalité) que lui.
Quel est le rapport entre le mot mort
et la réalité (l’expérience) qui est désignée? Ce rapport est arbitraire (cf.
Saussure). Chaque auditeur entend le terme selon l’expérience qu’il en a. Quand deux personnes regardent une feuille jaune,
celle qui s’aide d’une lumière bleuâtre verra une feuille plutôt verte, celle
qui la regarde à la lueur rouge de sa lampe de chevet, verra une feuille à la teinte orange. Ils
regardent le même objet mais voient des images différentes. Versez de la peinture
rouge dans un seau de peinture bleu, vous avez du violet. Dans un seau de
peinture jaune, vous aurez de la couleur orange. C’est la même chose avec le
texte et la compréhension. L’image prend forme au contact de l’expérience de
celui qui la reçoit.
Voici une publicité qui s'inscrit
dans une série de campagnes publicitaires (1989) de la Transport Accident
Commission (TAC) d'Australie. Le slogan
(‘’If you drink, then drive, you're a bloody idiot’’) qui pourrait se traduire
« Si tu bois, puis conduis, tu es un sacré idiot »[1]. Que
peut entendre ou voir un auditeur? Selon des considérations et réalités socioculturelles,
religieuses ou géographiques par rapport à la route, aux accidents, à l’alcool?
Ou même par rapport à son histoire? Voici un parallélisme qu’un sénégalais (de l’Afrique de l’ouest ou tout
africain) qui connait Gorée[2] et
la Porte du voyage sans retour peut
faire par rapport à cette pub qui vient d’Australie!!!
Notez la symétrie entre les différentes strates que
nous pouvons remarquer entre ces deux images. Sur la gauche l’image de la pub
qui fait référence à une tombe creusée (?). Sur la gauche, la Porte du voyage
sans retour qui était, durant l’esclavage, le seuil à franchir au-delà duquel,
il n’était plus question de retour pour un individu vendu comme esclave (pour
les Amériques), une sorte d’exil spirituel et physique dont nul ne revenait,
une mort certaine pour les siens.
Cet exemple nous montre comment l’appréciation peut
varier. Il semble donc qu’il est très important pour celui qui parle de s’intéresser plus à celui à qui il parle qu’à
lui-même. Alors comment apprécier ce qui est compris?
Dans un milieu réduit,
comme dans une salle de classe, en
didactique, par exemple, à la place de demander à un élève s’il a compris, mieux vaut lui demander ce qu’il a compris. Et
mieux encore, le laisser agir par
rapport à ce qu’il a compris, pour en tirer les meilleurs enseignements.
Dalla Malé Fofana PhD
Chargé de cours
PhD. Études fr., Linguistique et Communication,
M. Sciences du langage, langues secondes
Université de Sherbrooke ; Bishop’s University
fofan002@gmail.com
http://dallamalefofana.blogspot.ca/
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